Le Devoir – Les États-Unis ont dit lundi être prêts à « continuer à fournir » des armes à Israël, tout en appelant à acheminer davantage d’aide à Gaza, où les frappes israéliennes ont encore tué des dizaines de Palestiniens et la situation humanitaire reste catastrophique.

En visite lundi en Israël, le chef du Pentagone, Lloyd Austin, a assuré au premier ministre Benjamin Nétanyahou que les États-Unis continueraient à « fournir à Israël l’équipement dont il a besoin […], y compris des munitions critiques, des véhicules tactiques et des systèmes de défense aérienne ».

Les États-Unis ne souhaitent pas « imposer un calendrier » à Israël pour la suite des hostilités, a-t-il encore dit alors que Washington commençait à montrer récemment des signes d’impatience face à son allié israélien, dans un contexte marqué par une indignation internationale croissante face aux très lourdes pertes civiles dans le territoire palestinien, géré par le mouvement islamiste Hamas.

Alors que l’aide internationale, dont l’entrée est soumise à l’autorisation d’Israël, arrive encore en quantité très limitée, le ministre américain a ainsi mis en avant la nécessité de « fournir une aide humanitaire accrue aux près de deux millions de personnes déplacées à Gaza ».

La diplomatie américaine a fait état lundi de l’entrée dans la bande de Gaza de camions du secteur privé, ne faisant pas partie d’un convoi humanitaire, une première depuis le début de la guerre, selon Washington.

Depuis dimanche, des convois sont entrés dans le territoire par les points de passage de Rafah, via l’Égypte, et de Kerem Shalom, au sud d’Israël, a rappelé dans un communiqué l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (Ocha).

« Mais les conditions nécessaires pour mener les opérations humanitaires au niveau nécessaire pour les populations ne sont toujours pas réunies », a déploré l’agence.

Le 7 octobre, des commandos du Hamas avaient lancé depuis la bande de Gaza une attaque sans précédent, faisant environ 1140 morts en Israël, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP à partir des derniers chiffres officiels israéliens. Quelque 250 personnes ont été prises en otage, dont 129 sont toujours retenues à Gaza, selon les autorités israéliennes.

En représailles, ces dernières ont promis de détruire le Hamas, l’armée pilonnant la bande de Gaza sans relâche et y menant depuis le 27 octobre des opérations au sol.

Depuis le 7 octobre, 19.453 personnes — femmes, enfants et adolescents en majorité — ont été tuées dans la bande de Gaza, selon le dernier bilan annoncé lundi par le gouvernement du Hamas.

« Famine »

De nouvelles frappes israéliennes ont fait dimanche et lundi des dizaines de morts, selon le Hamas, qui a aussi diffusé des images présentées comme celles d’un véhicule militaire israélien touché par un missile, au nord de la bande de Gaza.

L’armée israélienne a perdu deux soldats lundi, portant le bilan des militaires tués depuis le début du conflit à 128.

Destructions considérables, déplacements massifs de civils, hôpitaux hors service, sur un territoire soumis par Israël à un siège depuis le 9 octobre : sur le terrain, la situation humanitaire reste désastreuse.

L’organisation Human Rights Watch (HRW) a accusé lundi Israël d’utiliser « la famine des civils comme technique de guerre […], ce qui constitue un crime de guerre », des accusations auxquelles le gouvernement israélien a réagi en qualifiant HRW « d’organisation antisémite et anti-israélienne ».

Environ 1,9 million d’habitants, soit 85 % de la population de la bande de Gaza, ont été déplacés par la guerre.

« Cette vie est triste »

Dans un camp de tentes à Rafah, dans le sud du territoire, des déplacés tentent lundi de se réchauffer autour de braseros de fortune. « On a juste des couvertures légères, et je vous jure qu’on dort par terre », explique un Gazaoui qui n’a pas souhaité donner son nom.

« L’hiver est tellement froid, le pire, c’est quand il faut aller aux toilettes. Il n’y a aucun service, pas d’eau, pas de ramassage des ordures, l’odeur des égouts est partout », décrit à un journaliste de l’AFP cet homme. « Cette vie est triste, plus triste encore que ce que vous pouvez imaginer ».

Plusieurs hôpitaux ont aussi été pris dans les combats. Israël accuse le Hamas, classé organisation terroriste par les États-Unis, l’Union européenne et Israël, de s’en servir comme bases et d’utiliser les civils comme des « boucliers humains », ce que le mouvement palestinien dément.

L’hôpital Al-Chifa, dans la ville de Gaza, et l’hôpital Nasser de Khan Younès ont encore été visés dimanche et lundi par des frappes meurtrières, selon le Hamas.

Négociations sur les otages

Sur le plan diplomatique, 10 jours après un veto américain, le Conseil de sécurité de l’ONU devrait se prononcer mardi sur un nouveau texte appelant à une « cessation urgente et durable des hostilités » à Gaza, un vote initialement prévu lundi.

En parallèle, des tractations se poursuivent pour la mise en oeuvre d’une nouvelle trêve.

D’après le site d’informations Axios, le patron de la CIA, Bill Burns, a rencontré à Varsovie des responsables israéliens et qataris en vue de nouvelles négociations sur la libération d’otages.

Une pause de sept jours avait permis fin novembre la libération de 105 otages à Gaza, dont 80 en échange de 240 Palestiniens détenus dans des prisons israéliennes.

Lundi, le Hamas a diffusé une vidéo de trois otages israéliens âgés en vie, trois jours après que l’armée israélienne a admis avoir tué par erreur trois autres otages, âgés de 25 à 28 ans.

Région sous tension

Dans la région, les foyers de tension sont nombreux et les inquiétudes d’une extension du conflit sont fortes.

En Cisjordanie occupée, quatre Palestiniens ont été tués dans un nouveau raid israélien, selon le ministère palestinien de la Santé.

À Beyrouth, la cheffe de la diplomatie française, Catherine Colonna, a exhorté lundi le Liban à faire preuve de retenue, après un appel similaire, la veille, auprès de responsables israéliens.

Le chef du Pentagone, Lloyd Austin a quant à lui appelé le Hezbollah libanais à ne pas « provoquer un conflit plus large ».

Depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, le Hezbollah a en effet multiplié les tirs depuis le sud du Liban frontalier d’Israël pour soutenir son allié palestinien, et l’armée israélienne riposte par des bombardements.

Enfin, en mer Rouge, les rebelles Houthis du Yémen, proches de l’Iran, ont revendiqué lundi de nouvelles attaques contre deux navires selon eux « liés à Israël », des attaques « irresponsables » pour le chef du Pentagone, qui a annoncé la mise en oeuvre prochaine d’une « coalition internationale » pour y faire face.

AFP

By Albert C. Diop

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