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Cinq ans après le renversement du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), le Mali reste dirigé par les généraux (colonels au moment des faits) à l’origine du putsch d’août 2020. La transition, prolongée à plusieurs reprises, est marquée par des réformes institutionnelles, des tensions diplomatiques et une insécurité persistante.
Le 18 août 2025 marque le cinquième anniversaire du coup d’État militaire qui avait renversé le président Ibrahim Boubacar Keïta en 2020. Depuis, le pays reste dirigé par les officiers à l’origine du putsch, dans le cadre d’une transition prolongée marquée par des réformes institutionnelles, des changements politiques, des ajustements diplomatiques et une situation sécuritaire toujours complexe.
Une transition prolongée
Après la chute d’IBK, une transition civile dirigée par Bah N’Daw et Moctar Ouane avait été mise en place en septembre 2020. Celle-ci a pris fin en mai 2021, lorsque les militaires ont pris le contrôle et placé Assimi Goïta à la tête de l’État. Depuis, plusieurs réformes ont été adoptées : une nouvelle Constitution en juillet 2023 instaurant un régime présidentiel renforcé, la dissolution en mai 2025 des partis et organisations à caractère politique, puis la révision de la Charte de la transition en juillet 2025, fixant la durée du mandat présidentiel à cinq ans renouvelables sans limite jusqu’à la pacification du pays. Le 30 juillet 2025, une Charte nationale pour la paix et la réconciliation a également été adoptée, après le retrait du Mali de l’Accord d’Alger en janvier 2024, afin de proposer un cadre interne de règlement des conflits.
Les principaux dirigeants de la transition, issus du Conseil national pour le salut du peuple (CNSP), ont par ailleurs été promus au grade de généraux en 2024, consolidant ainsi leur rôle au sommet de l’appareil d’État.
Réformes électorales et incertitudes
En août 2025, le Conseil des ministres a adopté un projet d’ordonnance modifiant la loi électorale de 2022. Les ajustements portent sur l’élargissement de la période de révision des listes électorales, l’assouplissement des conditions d’inscription et la transmission continue des listes à l’Autorité indépendante de gestion des élections (AIGE). Ces mesures visent à renforcer l’inclusivité et la transparence du processus, mais l’absence d’annonce d’un calendrier électoral continue d’entretenir l’incertitude.
Tensions politiques et affaires judiciaires
La scène politique reste marquée par des tensions. Début août 2025, onze personnes, dont le ressortissant français Yann Vezilier et plusieurs officiers maliens, ont été arrêtées pour un complot présumé contre les institutions. L’ancien Premier ministre Choguel Maïga, remplacé en décembre 2024 par le général Abdoulaye Maïga, a par ailleurs été placé en garde à vue dans une enquête pour malversations présumées liées à la Primature et au Fonds d’accès universel.
Relations extérieures et alliances régionales
Sur le plan international, le Mali a mis fin à sa coopération militaire avec la France après le départ de l’opération Barkhane en 2022 et a renforcé ses liens avec la Russie, dont des instructeurs militaires sont déployés sur le territoire. En septembre 2023, le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont créé l’Alliance des États du Sahel (AES), devenue Confédération en juillet 2024 lors de leur sommet à Niamey. Les trois pays se sont retirés de la Cédéao, décision devenue effective en janvier 2025, à l’expiration du délai réglementaire. Les relations avec l’Algérie se sont en revanche tendues après la destruction d’un drone malien par la défense aérienne algérienne à Tinzaouatène dans la nuit du 31 mars au 1er avril 2025, entraînant la fermeture réciproque des espaces aériens et le rappel des ambassadeurs.
Situation sécuritaire et opérations militaires
Sur le plan sécuritaire, les Forces armées maliennes (FAMa) poursuivent des opérations dans le nord et le centre du pays. En avril 2025, elles ont lancé l’opération « Dougoukolokô », visant à rétablir l’autorité de l’État. Le 1er juillet, les FAMa, appuyées par des partenaires russes, ont annoncé avoir repoussé des attaques coordonnées du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM) dans plusieurs localités, dont Niono, Nioro du Sahel et Diboli, près de la frontière sénégalaise. L’état-major a fait état de pertes infligées aux assaillants, mais le JNIM a revendiqué les attaques en affirmant avoir touché les forces maliennes. Fin juin, à Gao, les FAMa ont arrêté Abraham Boubacar, alias « Oubel », présenté comme un cadre de l’État islamique au Sahel, ainsi que plusieurs de ses hommes, et ont annoncé la neutralisation d’un autre responsable, « Abou Dahdah », près de Ménaka. Ces opérations sont présentées comme des avancées, même si les Nations unies continuent d’alerter sur la persistance de la menace sécuritaire.
Un cinquième anniversaire sans échéance électorale
Cinq ans après le coup d’État d’août 2020, le Mali poursuit une transition conduite par les militaires, marquée par l’adoption de nouvelles chartes, des réformes institutionnelles et des évolutions diplomatiques. L’absence de calendrier électoral, combinée à la persistance des violences armées et aux tensions régionales, entretient l’incertitude sur la suite du processus en cours.