Source : Points Chauds – Mauritani

Ghazouani : encore un voyage qui met la Mauritanie dans un tourbillon de mystère : ….

Cache-t-il une préoccupation sanitaire ou des missions secrètes ?

Alors que le président mauritanien Mohamed Ould Ghazouani demeure absent depuis deux semaines, les questions se multiplient sur la nature exacte de ce voyage. Débutant par un sommet africain en Tanzanie, il se poursuit sans annonce officielle de retour, alimentant des soupçons autour d’éventuels problèmes de santé ou de négociations géopolitiques qui pourraient remodeler les alliances régionales. Le récent rapprochement entre Nouakchott et Rabat et les spéculations sur un rôle espagnol dans le dossier du Sahara occidental donnent encore plus de poids à cette absence prolongée.

Carte du parcours… De l’énergie africaine aux dossiers brûlants

Station Tanzanie : participation brève et départ soudain

Ghazouani a assisté au Sommet africain de l’énergie (27-28 janvier), un événement visant à attirer des investissements pour des infrastructures énergétiques. Cependant, son départ précipité et sans explication officielle a immédiatement suscité des interrogations.

Un voyage prolongé sans retour annoncé 

 Des sources médiatiques rapportent qu’il pourrait s’agir d’une visite médicale, tandis que d’autres suggèrent des négociations politiques majeures. Par ailleurs, la première dame aurait été transférée du Maroc vers l’Espagne pour des soins médicaux d’urgence, certaines sources indiquant que cela visait à éviter que des visites « privées » ne deviennent trop visibles au Maroc. Pourtant, dans le cadre du lancement du plan national de réduction de la mortalité maternelle et néonatale, elle est apparue mardi dans une allocution enregistrée, affaiblie mais résiliente.

Au-delà de ces préoccupations de santé, le moment intrigue : il y a seulement deux mois, la visite du président Ghazouani à Madrid avait été suivie d’un rapprochement notable entre la Mauritanie et le Maroc, suggérant qu’une nouvelle approche du dossier du Sahara occidental pourrait être en préparation.

Le silence mauritanien : accords en coulisses ou crise sanitaire ?

Hypothèse sanitaire : absence inquiétante mais non confirmée

Aucune annonce officielle ne confirme un état de santé préoccupant du président, mais l’absence prolongée et le mutisme du gouvernement alimentent les doutes.

Hypothèse géopolitique : l’Espagne, un médiateur discret ?

L’Espagne, ancienne puissance coloniale du Sahara occidental, pourrait jouer un rôle clé dans les discussions entre Nouakchott et Rabat, dans un contexte où :

 L’influence de la Russie et du groupe Wagner s’accroît au Sahel.

 L’insécurité persiste à la frontière mauritano-malienne.

Un accord d’interconnexion électrique entre le Maroc et la Mauritanie a été signé récemment, prévoyant une connexion énergétique future avec l’Europe via l’Espagne.

Si les négociations en cours se confirment, et qui seraient actuellement en secret en Espagne, cela rappellera immanquablement l’histoire des accords de Madrid. Signés le 14 novembre 1975 par l’Espagne, le Maroc et la Mauritanie, ces accords ont fixé les conditions du retrait espagnol du Sahara occidental et la partition du territoire entre le Maroc et la Mauritanie. Un tel contexte laisse présager d’importants bouleversements géopolitiques.

Qui dit Mauritanie-Maroc-Espagne, dit dossier du Sahara occidental et qui dit dossier Sahara occidental, dit frontières mauritaniennes.

La région du Sahel et du Sahara : restructuration ou confrontation désastreuse ?

La région connaît des transformations majeures, marquées par l’émergence de nouveaux acteurs tels que l’Émirats arabes unis, la Turquie, la Russie, et Chine, alors que l’influence française s’amenuise.  La Mauritanie pourrait chercher à repositionner son rôle stratégique.

Nouakchott, un futur acteur clé ?

La Mauritanie est membre du Dialogue méditerranéen de l’OTAN depuis 1995 et bénéficie depuis 2013 d’un programme de renforcement de la formation en défense.

Vue la position géostratégique de la Mauritanie, les États-Unis ne veulent pas laisser la zone vide. Par l’intermédiaire de l’OTANWashington souhaite renouveler la nouvelle stratégie de sécurité dans la région avec la Mauritanie comme colonne vertébrale du développement, ce qui fait de la Mauritanie un acteur incontournable par nature, sauf obstruction faite par manque d’ambition des autorités politiques et militaires du pays.

L’objectif de l’OTAN en Mauritanie ne se limiterait pas à l’installation de vouloir d’une base militaire destinée à combattre le terrorisme au Sahel. Il inclut également la volonté de neutraliser les efforts russes visant à étendre leur influence sur le territoire mauritanien et le littoral atlantique, tout en renforçant une posture stratégique qui pourrait représenter une menace pour le flanc sud de l’alliance, notamment les îles Canaries.

Ce que la Mauritanie a vite compris pour aller accueilli froidement le ministre russe des Affaires étrangères lors de son dernier passage à Nouakchott.

Ainsi ces intérêts accordés par ces puissances régionales et internationales à l’égard de la Mauritanie, pourrait faire de la Mauritanie un facilitateur entre le Maroc, l’Algérie et le Polisario, ou bien pousser la Mauritanie à négocier en échange de concessions sur la sa position relative à la question du Sahara occidental.

Quels scénarios possibles ?

Un accord secret sur le Sahara occidental : Un compromis pourrait émerger, aboutissant à une reconnaissance de l Marocanité du Sahara , à un gel ou une suspension de reconnaissance de la RASD, redistribuant ainsi les cartes et suscitant des tensions avec le Front Polisario et son allié.

Une alliance Mauritanie-Maroc-Espagne : Cette coopération pourrait redéfinir les équilibres sécuritaires au Sahel et contrer l’influence de l’axe Algéro-russe.

Une déstabilisation régionale : Une mauvaise gestion des enjeux (Sahara occidental, alliances nouvelles, inattendues et contre nature) pourrait engendrer des tensions internes en Mauritanie et fragiliser la stabilité.

l’appât l’hameçon

Paradoxalement, l’appât qui soulève même des interrogations, dans ces négociations, s’ils s’éverrés, est le projet d ’accès des États du Sahel à l’océan Atlantique, un projet géopolitique, qui de l’avis des spécialistes en géoéconomie, n’a pas de chance de réussite du fait qu’il sera implanté dans une zone en conflit ouvert et sans garantie d’épanouissement économique. Alor que ces mêmes ambitions pouvaient être attribués a la Mauritanie, car de facto, elle est le seul pays de la région à disposer d’une façade atlantique directement connectée aux pays du Sahel. Cette position géographique lui confère un avantage stratégique majeur dans le projet Grand Atlantique, qui vise à relier les pays enclavés du Sahel à l’océan Atlantique.

Sans l’accord de la Mauritanie, le projet ne peut pas voir le jour, car c’est à partir de son territoire que les infrastructures doivent être développées, exploitées et déployées pour relier les pays du Sahel à l’Atlantique. Cela place la Mauritanie en position de force et de jouer un rôle central dans l’intégration économique des pays du Sahel, tout en renforçant ses relations avec les partenaires internationaux (le Maroc l’Algérie, Émirats arabes unis, Union européenne, etc.).

En fin de comptes, renforcerait la position diplomatique de la Mauritanie et lui permettrait de peser davantage dans les décisions régionales et international.

En somme, la Mauritanie n’a pas besoin du projet Grand Atlantique autant qu’elle a besoin de la stabilité de ses frontières ; c’est le projet qui a besoin de la Mauritanie. En prenant les devants, la Mauritanie peut transformer ce projet en une opportunité historique pour son développement et son repositionnement sur la scène internationale.

De ce fait la Mauritanie doit renforcer sa position et faire accepter aux parties et aux partenaires qu’il est préférable de ne pas faire engager la Mauritanie a des positions pour des projets qui peuvent se réaliser avec un clic sur le sol Mauritanie et dont elle reste la clé de sa concrétisation.

Absolument ! La Mauritanie doit renforcer sa position stratégique et faire comprendre aux parties prenantes et aux partenaires internationaux qu’elle est indispensable à la concrétisation de projets comme le Grand Atlantique. En même temps, elle doit insister sur le fait qu’elle ne doit pas être engagée dans des positions qui pourraient compromettre ses choix stratégiques ou ses intérêts nationaux.

Un tournant décisif pour la Mauritanie

L’absence prolongée de Ghazouani dépasse le cadre national et reflète des enjeux géopolitiques majeurs :

Sur le plan national : La gestion d’une telle crise sans visibilité sur le leadership teste la solidité des institutions.

À l’échelle régionale : La lutte d’influence entre puissances traditionnelles et nouvelles est en pleine mutation.

Au niveau international : L’Espagne semble vouloir désormais jouer un rôle plus actif dans l’équilibre des forces en Afrique face à la Russie et la Chine. En tout cas c’est ce qui a ressorti depuis le dernier sommet en décembre, qui avait démontré la Stratégie Espagne-Afrique 2025-2028 vise à servir de pont entre l’Europe et l’Afrique en renforçant les liens avec le continent voisin mais aussi avec des pays comme la Mauritanie.

La grande question demeure : Ghazouani reviendra-t-il avec un « accord historique » qui renforcerait la position de la Mauritanie, ou avec de nouvelles interrogations susceptibles d’affaiblir son pays ?

En tous cas tous nos souhaits de Bonne santé pour Madame et le président

MN

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