Lequotidien 

Des informations font état d’un accord passé par le leader de l’ex-Pastef avec les autorités, pour lui permettre de purger sa détention à l’hôpital Principal. Une faveur qui coûte 150 mille francs Cfa par jour au contribuable.

Il semblerait que les locaux de l’hôpital Principal de Dakar soient devenus une annexe de l’Administration pénitentiaire. Des esprits chagrins me diraient que du moment que le Pavillon spécial où sont internés des prisonniers malades est situé dans son enceinte, on peut estimer qu’effectivement, le centre hospitalier public de Dakar-Plateau est lié à l’Administration pénitentiaire. Mais il ne s’agit pas de cela.
S’il est vrai qu’un détenu mal en point physiquement peut être transféré au Pavillon spécial, il est tenu de regagner son lieu de détention une fois sa santé rétablie. Mais à ce jour, Ousmane Sonko, leader du parti dissous Pastef, est toujours interné au Pavillon spécial de l’hôpital Principal, plus de 72 jours après y avoir été évacué d’urgence. Tout le monde au Sénégal sait que M. Sonko a été conduit dans ces locaux à la suite de malaises occasionnés par sa grève de la faim, entamée en protestation de son emprisonnement, intervenu le 31 juillet 2023. L’Administration pénitentiaire avait informé que Ousmane Sonko était interné depuis le 6 août dernier.
Beaucoup de spéculations avaient tourné autour de la santé de M. Sonko. A un moment, plusieurs personnalités, aussi bien de la Société dite civile que de la politique, avaient lancé des alertes sur la détérioration de son organisme, certains allant jusqu’à prédire sa mort à plus ou moins bref délai s’il n’était pas libéré. Même ses deux épouses avaient fait une sortie télévisée devenue mémorable, dans laquelle l’une d’elles comparait l’organisme de son mari à celui de son fils d’une dizaine d’années. Tellement il s’était, disait-elle, dégradé. On se rappelle aussi cette honorable leader politique, alliée de Ousmane Sonko, après avoir été ministre et militante politique de plusieurs régimes, se plaignant que Ousmane Sonko n’était plus en état de reconnaître qui que ce soit, son organisme étant fortement affaibli par la grève de la faim.
Toutes les interventions n’ont pas pu convaincre les autorités pour qu’elles relâchent le leader de l’ex-Pastef. Mais elles ont néanmoins eu pour effet positif de convaincre ce dernier d’abandonner sa grève de la faim. Le 2 septembre 2023, ses proches collaborateurs et des médias ont annoncé que leur chef avait arrêté sa diète et entrepris de s’alimenter normalement. Et il semblerait que depuis lors, il ait repris toutes ses forces et sa vigueur. Mais depuis cette date, il reste toujours «en observation» à l’hôpital Principal.
Qu’est-ce qui vaut cette faveur à Ousmane Sonko ? Le Quotidien a appris auprès de certains membres de l’Adminis-tration pénitentiaire que le «Patriote en chef» aurait «passé un accord avec les autorités» pour continuer son internement à «Principal» et ne pas être ramené à sa cellule de la prison de Sébikotane.
Sur quelles bases ? Personne ne peut le dire.
Cette situation commence d’ailleurs à faire grincer des dents au sein de la formation hospitalière. Des membres du personnel soignant font remarquer que le lit affecté à M. Sonko, qui ne souffre d’aucune pathologie, lèse de ce fait, un malade. Et les ressources du service des urgences de l’hôpital ne sont pas extensibles à souhait. «Si nous devions recevoir un grand nombre de malades urgents d’un seul coup, l’un d’eux aurait des problèmes de lit, parce que M. Sonko en occupe un», se désole un médecin, qui n’a pas souhaité être nommé.
Cette personne fait noter que le plateau qui est consacré à Ousmane Sonko revient à 150 mille francs Cfa la journée. Or, ce n’est pas ce dernier qui débourse ce montant. Donc, fait-il comprendre, «depuis plus de 70 jours, l’Etat débourse 150 mille francs Cfa par jour, de notre argent, pour prendre en charge une personne qui n’est pas malade. Cela, au détriment de véritables malades, qui n’ont pas le bonheur de bénéficier d’une telle générosité».
D’autres personnes soulignent qu’aucun autre détenu n’a jamais bénéficié d’autant de faveurs et pendant si longtemps. Ni Hissein Habré, ni Sitor Ndour, ni aucun autre détenu politique ou de droit commun, n’a jamais été couvert d’autant de sollicitude. La question qui se pose dès lors, est de savoir, de quoi l’Etat a-t-il peur de la part de Ousmane Sonko ?
mgueye@lequotidien.sn

By Albert C. Diop

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