(Agence Ecofin) – Transformation et modernisation, multiplication des investissements, développement des infrastructures, diversification de l’économie, grandes avancées sur les plans social et culturel. Le Maroc sous le règne de Mohammed VI a enregistré d’importants progrès socio-économiques et est devenu l’un des pays les plus développés d’Afrique. Alors que le monarque célèbre, ce 30 juillet, les 25 ans de son arrivée au pouvoir, Agence Ecofin fait un tour d’horizon desdits progrès et des défis que « M6 » devra relever pour maintenir une bonne dynamique à l’avenir.
Les évolutions économiques
Sous le règne de Mohammed VI, le Maroc a alloué environ 11,2 % de son PIB à des investissements dans divers secteurs des infrastructures économiques, notamment les transports, l’eau et l’assainissement, l’irrigation, les technologies de l’information et de la communication, et l’électricité.
Parmi les projets les plus emblématiques, on peut citer le port de Tanger Med, qui est devenu l’un des plus grands hubs logistiques au monde, ainsi que le réseau de trains à grande vitesse, avec la ligne Al Boraq reliant Tanger à Casablanca. Le développement du réseau routier et ferroviaire, l’expansion des réseaux de tramway et de busway dans les grandes villes, ainsi que les investissements dans les infrastructures énergétiques et de l’eau, ont été des piliers de la modernisation du pays.
Ces investissements ont eu un impact profond sur l’industrialisation et le développement économique du Maroc. Le pays a réussi à diversifier son économie, passant à une économie plus industrialisée et technologiquement avancée. Le secteur de l’industrie automobile est devenu un pilier de l’économie marocaine, avec des usines de constructeurs mondiaux comme Renault et Stellantis. En 2022, les exportations du secteur automobile ont généré 111 milliards de dirhams (environ 11 milliards $), représentant environ 8 % du PIB. L’industrie aéronautique a également connu une croissance remarquable, attirant des investissements de grands constructeurs étrangers comme Boeing et Safran.
Les progrès sociaux
Sous le règne de Mohammed VI, le Maroc a réalisé des avancées sociales significatives grâce à des programmes et réformes ciblés. L’un des projets les plus emblématiques de cette période est l’Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH), lancée en 2005. L’initiative a mobilisé 43 milliards de dirhams entre 2005 et 2019 et 18 milliards de dirhams pour la période 2018-2023, visant à lutter contre la pauvreté et améliorer les conditions de vie. Les résultats ont été positifs, avec une progression de 18,3 % de l’Indice de Développement Humain entre 2005 et 2019 et une diminution du taux de grande pauvreté de 15,3 % en 2001 à 1,7 % en 2019.
« Au-delà de la croissance économique, notre objectif fondamental demeure la réalisation de la justice sociale [L’INDH est une] véritable feuille de route, pour une vision de développement globale et audacieuse, qui ne se limite pas aux catégories pauvres et aux familles démunies, mais qui s’ouvre sur tous les chantiers de développement visant à réduire les disparités sociales et territoriales », résumait le souverain en 2013, lors du 14e anniversaire de la fête du Trône.
La Charte nationale d’éducation et de formation de 1999 a permis de généraliser l’accès à l’éducation, faisant passer le taux de scolarisation des enfants de 6 ans de 53,7 % en 1999 à 95 % en 2013.
La Charte nationale d’éducation et de formation de 1999 a permis de généraliser l’accès à l’éducation, faisant passer le taux de scolarisation des enfants de 6 ans de 53,7 % en 1999 à 95 % en 2013.
Le budget de l’éducation a augmenté annuellement de 7,15 % entre 2001 et 2013. En 2015, un programme de réforme visait à améliorer la performance éducative, avec un accent sur l’inclusion des filles et l’égalité des chances.
Dans le domaine de la santé, l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO) et le Régime d’Assistance Médicale (RAMED) ainsi que d’autres réformes ont permis d’améliorer l’accès aux soins, avec 11 millions de bénéficiaires pour le RAMED en 2022. La pandémie de Covid-19, défi majeur du secteur sur les dernières années, a vu une mobilisation nationale renforcée sous Mohammed VI, avec 23,4 millions de personnes ayant reçu une deuxième dose de vaccin.
Les progrès sociaux portent également sur la réduction des inégalités de genre. La révision en 2004 du Code des personnes et de la famille (Moudawana) et le Programme national intégré d’Autonomisation économique des Femmes et des Filles en 2020 ont permis de réaliser d’importantes avancées, même si des défis subsistent. Le tissu associatif marocain, soutenu par le ministère de la Solidarité, de la Femme, de la Famille et du Développement social, a joué un rôle crucial dans le développement social. Plus de 21 000 associations ont ainsi bénéficié de subventions à hauteur de 12 milliards de dirhams entre 2019 et 2021.
Le Maroc en Afrique
Sous le règne de Mohammed VI, le Maroc a renforcé ses relations économiques et diplomatiques avec le continent africain grâce à une stratégie d’intégration régionale ambitieuse. Les exportations marocaines vers l’Afrique ont augmenté de 3,25 milliards de dirhams en 1999 à 32,66 milliards de dirhams en 2023, témoignant de l’efficacité des politiques commerciales. Les principaux partenaires commerciaux incluent l’Égypte, l’Afrique du Sud, Djibouti, la Tunisie et la Côte d’Ivoire.
Les investissements marocains en Afrique sont passés de 100 millions de dollars en 2014 à plus de 800 millions de dollars en 2021, faisant du Maroc le deuxième plus grand investisseur africain après l’Afrique du Sud et le premier en Afrique de l’Ouest. Des secteurs variés comme la finance, les télécommunications, l’agriculture et les mines ont bénéficié de ces investissements. Des groupes tels que BCP, Saham Group, Attijariwafa Bank et BMCE (devenue Bank of Africa) ont joué un rôle clé dans cette expansion. Maroc Telecom, privatisée en 2001, est présente dans dix pays africains et a contribué à 18,38 milliards de dirhams de revenus en 2023.
L’État marocain a également soutenu activement les investissements en Afrique à travers des entreprises comme l’OCP et Managem. L’initiative Afrique Atlantique, lancée en 2023, vise à offrir un accès à la mer aux pays enclavés du Sahel.
Sur le plan diplomatique, le Maroc a réintégré l’Union africaine en 2017 et a obtenu la reconnaissance de sa souveraineté sur le Sahara occidental par plusieurs pays africains. Mohammed VI a effectué plus de 50 visites officielles dans 26 pays africains, signant de nombreux accords de coopération. Le Maroc a également participé à des missions de maintien de la paix en RDC, en Centrafrique et au Mali, et a joué un rôle clé dans la résolution de conflits en Sierra Leone et en Libye.
Le pays a aussi contribué à la gestion des migrations en Afrique, notamment en accueillant la première conférence euro-africaine sur la migration en 2006 et en proposant un plan de régularisation des migrants en 2013, bénéficiant à plus de 40 000 personnes.
Les avancées sur les plans culturel et spirituel
Le Maroc sous Mohammed VI s’est affirmé comme une destination culturelle et spirituelle de premier plan, attirant un nombre croissant de touristes, de 2,4 millions en 1999 à 14,5 millions en 2023. Cette augmentation est due à des investissements dans les infrastructures culturelles et touristiques et à la création et expansion de festivals et événements culturels.
Le Maroc sous Mohammed VI s’est affirmé comme une destination culturelle et spirituelle de premier plan, attirant un nombre croissant de touristes, de 2,4 millions en 1999 à 14,5 millions en 2023.
Des projets emblématiques comme le Grand Théâtre de Casablanca, conçu par Zaha Hadid, et le Musée Mohammed VI d’art moderne et contemporain de Rabat ont enrichi la scène artistique marocaine. Le gouvernement a aussi investi dans la restauration de monuments historiques comme les médinas de Fès, Marrakech et Tétouan. Inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO, ils améliorent le cadre de vie des habitants et favorisant le développement économique local.
Les festivals jouent un rôle crucial dans la promotion de la culture marocaine. Le Festival International du Film de Marrakech, créé en 2001, attire des stars internationales, tandis que le Festival de Fès des Musiques Sacrées du Monde promeut le dialogue interculturel et interreligieux. Le Festival Gnaoua et Musiques du Monde à Essaouira célèbre la musique spirituelle des descendants d’anciens esclaves africains.
Sur le plan spirituel, Mohammed VI a renforcé le rôle de l’islam dans la société marocaine. Le ministère des Affaires Islamiques a supervisé la construction et la modernisation de nombreuses mosquées, avec 52 000 mosquées recensées en 2018 et 120 nouvelles prévues chaque année d’ici 2030. Les moussems, festivals honorant des saints ou célébrant des récoltes, jouent également un rôle important dans la richesse culturelle du pays. Ils attirent des milliers de participants et bénéficient du soutien gouvernemental.
Ces initiatives ont renforcé l’identité marocaine et stimulé le tourisme et l’économie locale. En intégrant modernité et tradition, Mohammed VI a fait de la culture et de la spiritualité des vecteurs essentiels de croissance et de rayonnement international pour le Maroc.
Les axes de progrès futurs : partager la prospérité
En un quart de siècle, les changements profonds impulsés par Mohammed VI pour développer le Maroc sont clairement visibles. Ces améliorations ne suffisent néanmoins pas encore à lisser totalement les inégalités héritées de ses prédécesseurs. Entre 1998 et 2006, la proportion du revenu total du Maroc détenue par les 20 % les plus pauvres de la population a stagné à 6,5 %, avant de progresser à 6,7 % en 2013, selon les dernières données disponibles auprès de la Banque mondiale.
Le marché du travail n’est également pas en mesure d’absorber la hausse de la population en âge de travailler, ce qui a conduit à une stabilisation du taux de chômage global à une moyenne d’environ 10 % au cours des deux dernières décennies. Le secteur informel représente environ 80 % de l’emploi total, tandis que les petites et micro-entreprises souffrent d’un accès relativement faible au crédit, limitant leur croissance.
Selon l’Enquête sur les entreprises de la Banque mondiale de 2019, seules 21 % des PME marocaines disposent d’une ligne de crédit, un taux inférieur à la moyenne de la région MENA et des économies à revenu intermédiaire. En 2017, la Société financière internationale a estimé à 14 milliards de dollars le déficit de financement pour les micros, petites et moyennes entreprises (MPME). Notons que le Maroc doit aussi fournir des efforts au niveau du capital humain pour garantir la prospérité partagée.
Le système éducatif marocain reste confronté à plusieurs défis importants, comme l’inadéquation entre les compétences acquises à l’école et celles demandées sur le marché du travail. Selon le rapport « Morocco’s Quest for Stronger and Inclusive Growth » publié en 2023 par le FMI, les résultats d’apprentissage, mesurés par les notes obtenues par les élèves marocains aux tests internationaux, sont parmi les plus faibles de la région MENA. Le document indique aussi que 72 % des étudiants quittent le système éducatif sans aucune qualification, citant le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique.
Le document indique aussi que 72 % des étudiants quittent le système éducatif sans aucune qualification.
Toujours en matière de capital humain, des inégalités persistent dans la couverture sanitaire du royaume chérifien. Les zones urbaines ont en effet un meilleur accès aux soins et de meilleures ressources que les zones rurales, notamment en matière d’infrastructures de santé et d’équipements médicaux. La pénurie de médecins et d’infirmières en zones rurales augmente aussi le temps d’attente pour les patients et limite leur accès à des soins spécialisés. Enfin, 38 % de la population n’a pas de couverture médicale.
Le Maroc doit aussi progresser pour réduire les inégalités entre les hommes et les femmes. Selon les données officielles datant de 2020, sur près de 17 millions de personnes détenant au moins un compte bancaire dans le pays, seulement 37% sont des femmes, contre 63% pour les hommes. Malgré la hausse du nombre de femmes inscrites dans l’enseignement secondaire, la même amélioration n’est pas visible en ce qui concerne la participation au marché du travail. En 2018, le taux de femmes hors du système scolaire (ou qui ne suivent aucune formation) était encore plus de deux fois supérieur à celui des hommes, indique le rapport du FMI cité plus haut.
En 2018, le taux de femmes hors du système scolaire (ou qui ne suivent aucune formation) était encore plus de deux fois supérieur à celui des hommes, indique le rapport du FMI.
Notons par ailleurs que les écarts entre les sexes sur le marché du travail marocain restent importants, avec un taux de chômage des femmes plus élevé que celui des hommes. Le taux de participation des femmes à la population active est en baisse depuis 2008, se situant à 22,5 % en 2023, selon les données de la Banque mondiale.
Un avenir plein de promesses
Malgré les points d’ombre, le développement économique et social au cours de ce quart de siècle sous Mohammed VI reste impressionnant. Quant à l’avenir, il se conjugue avec optimisme. Conscient des défis restants à relever, le gouvernement marocain s’attèle déjà à mettre en œuvre les réformes nécessaires pour garantir une croissance économique durable et inclusive.
Dans le contexte de la reprise post-Covid et sous l’impulsion du souverain, le Fonds Mohamed VI pour l’investissement a été créé en 2020 avec un budget initial de 15 milliards de dirhams (1,5 milliard $). Il est chargé de financer et d’accompagner les grands projets d’investissement, aux niveaux national et territorial, ainsi que de prendre des participations dans le capital des petites et moyennes entreprises.
Le roi a promulgué dans la foulée la loi portant Charte de l’investissement en 2022, afin de soutenir l’ambition de porter les investissements privés à deux tiers des investissements totaux d’ici 2035. Ces différents instruments sont aussi destinés à favoriser la création d’emplois stables, la réduction des disparités territoriales et le développement durable.
Concernant le capital humain, les autorités travaillent à généraliser la protection sociale et à réformer le secteur de l’éducation. Fidèle à son esprit réformateur, le souverain supervise depuis quelques mois un projet de modification du code de la famille. Après six mois de travaux, la commission chargée de le réviser a transmis fin mars 2024 un projet de loi au roi Mohammed VI qui procèdera aux arbitrages nécessaires avant de soumettre le texte au Parlement. Des modifications importantes sont attendues pour améliorer la condition de la femme marocaine.