Samuel Benshimon sahel-intelligence.com
Le ministre de la Communication du gouvernement militaire du Niger a annulé la suspension d’une chaîne de télévision privée de premier plan ainsi que celle de son rédacteur en chef, des mesures qui avaient été prises sans explication après la diffusion d’un reportage critiquant l’efficacité du gouvernement. L’information a été confirmée lundi par l’AFP.
Vendredi dernier, le ministre Sidi Raliou Mohamed avait ordonné la suspension de la carte de presse du rédacteur en chef de Canal 3 TV, Seyni Amadou, pour une durée de trois mois, et celle des programmes de la chaîne pour un mois. Le lendemain, M. Amadou avait été arrêté et placé en garde à vue.
« Les sanctions ont été levées et Seyni Amadou devrait être libéré », a déclaré Ismaël Abdoulaye, directeur général de Canal 3 TV, à l’AFP.
Le président du Réseau des radios et télévisions indépendantes du Niger (R/RTIN) a aussi confirmé que les sanctions contre la chaîne et le journaliste avaient été annulées.
L’ONG Reporters sans frontières (RSF) a exprimé sa satisfaction après l’annulation des sanctions, en appelant à la « libération immédiate » de Seyni Amadou. Elle a dénoncé les suspensions comme « illégales » et a insisté sur la nécessité de défendre la liberté de la presse. « Les autorités n’auraient jamais dû prendre de telles mesures. RSF appelle à respecter la liberté de la presse et le droit à l’information », a déclaré Sadibou Marong, directeur du bureau Afrique subsaharienne de l’ONG.
RSF a précisé que Seyni Amadou avait été interpellé au siège de la télévision et mis en garde à vue samedi, accusé de « diffusion de données perturbant l’ordre public », « atteinte à la sûreté de l’État » et « tentatives de discréditer les institutions de la République », selon l’avocat du journaliste, Saïd Ould Salem.
Le Niger occupe la 80e place sur 180 pays dans le classement 2024 de la liberté de la presse publié par Reporters sans frontières. Le pays a récemment connu plusieurs arrestations de journalistes : Idrissa Soumana Maiga, directeur du quotidien L’Enquêteur, avait été emprisonné de mars à juillet 2024 pour « atteinte à la défense nationale », tandis que la journaliste Samira Sabou avait été interpellée et détenue au secret en septembre et octobre 2023 avant d’être libérée sous caution et inculpée pour « diffusion de données perturbant l’ordre public ».
Depuis le coup d’État du 26 juillet 2023, le régime militaire en place a également suspendu la diffusion de plusieurs médias internationaux, tels que RFI, France 24 et la BBC.