Le groupe armé M23, appuyé par des forces rwandaises, progresse « assez rapidement » vers Bukavu, capitale du Sud-Kivu en République démocratique du Congo (RDC), a alerté vendredi l’ONU, qui redoute une extension du conflit à l’échelle régionale.
Une avancée stratégique vers le Sud-Kivu
Jean-Pierre Lacroix, chef des opérations de paix de l’ONU, a indiqué lors d’un point presse à New York que les rebelles se trouvaient désormais à « environ 60 kilomètres au nord de Bukavu », après s’être emparés de Minova le 21 janvier. Cette progression marque leur première incursion dans le Sud-Kivu depuis le retrait de la MONUSCO (Mission de l’ONU en RDC) de la province en juin 2024.
Le responsable onusien a souligné le risque que représente la proximité du M23 avec l’aéroport de Kavumu, crucial pour desservir Bukavu : « S’ils prenaient le contrôle de cet aéroport, ce serait une autre étape importante. »
Craintes d’une crise régionale
M. Lacroix a exprimé ses inquiétudes face aux tensions croissantes entre le Rwanda et l’Afrique du Sud, principal contributeur de troupes à la force régionale SAMIDRC déployée dans l’est de la RDC. Les récents échanges virulents entre les présidents Paul Kagame (Rwanda) et Cyril Ramaphosa (Afrique du Sud), accusé par Kigali de « mentir » sur la situation, illustrent cette escalade verbale.
Le chef de l’Alliance Fleuve Congo, Corneille Nangaa, allié du M23, a par ailleurs annoncé jeudi sa volonté d’« avancer vers Kinshasa », alimentant les craintes d’une extension du conflit vers la capitale congolaise.
Diplomatie en surchauffe
Face à l’urgence, la MONUSCO intensifie ses efforts pour relancer les négociations. Sa cheffe, Bintou Keita, a rencontré la Première ministre congolaise Judith Suminwa Tuluka et des ministres clés. M. Lacroix a salué les initiatives diplomatiques régionales, dont un sommet extraordinaire de la SADC (Communauté d’Afrique australe) au Zimbabwe et une réunion d’urgence du Conseil de paix de l’Union africaine.
Goma : calme précaire et défis logistiques
À Goma, tombée cette semaine sous contrôle rebelle, la situation reste « tendue et volatile », selon l’ONU, malgré un retour progressif à la normale. L’accès à l’eau et à l’électricité a été rétabli dans une large partie de la ville, mais des munitions non explosées entravent les déplacements.
La MONUSCO, dont les bases abritent des milliers de civils et d’ex-combattants, est cependant « débordée », peinant à fournir eau et services sanitaires. « Les infrastructures sont saturées », a reconnu M. Lacroix, rappelant le caractère « inviolable » des locaux onusiens.
La MONUSCO, déployée depuis des années dans l’est de la RDC, reste active au Nord-Kivu et en Ituri. Le conflit avec le M23, réactivé fin 2023, a déjà provoqué le déplacement de plus de 800 000 personnes, selon l’ONU.
AC/APA