Amadou Ba a un atout majeur par rapport aux autres candidats. Ces derniers ne peuvent, pour le moment, pas battre campagne. Avec sa casquette de Premier ministre, il peut se permettre ce que les autres n’ont pas les moyens de faire, à savoir sillonner le Sénégal au motif de conduire les affaires du pays. On ne le voit pas perdre cet avantage au prochain remaniement.
Par Malick GAYE – A 6 mois de la Présidentielle, la majorité des candidats sont connus. Pour beaucoup, c’est désormais l’heure de la pêche aux parrainages, sinon aux électeurs. Visites de proximité, événements religieux ou sportifs, tout est bon pour chercher à se distinguer des autres, s’afficher et s’épancher sur le bien-fondé de sa candidature. C’est le temps de la générosité et de la proximité. Le but est de convaincre le maximum d’électeurs avant l’ouverture officielle de la campagne.
Bien que le tamis du parrainage n’a pas encore livré ses résultats, les candidats déclarés mettent à profit ce temps afin de prêcher pour leur paroisse. Khalifa Sall de Taxawu Senegaal a repris son Nemeku tour. En petit comité, l’ancien maire de Dakar sillonne le pays pour remobiliser ses troupes. Aminata Touré fait la même chose. Moins chanceux, Malick Gackou du Grand parti a été contraint, par arrêté préfectoral, de cesser sa «précampagne». Avec une forte délégation, il avait investi le Nord du pays, généralement acquis à la cause du pouvoir. En fin stratège, Malick Gackou a activé sa cellule de communication pour tirer profit de cet «acharnement» sur sa personne. Bougane Guèye Dany a également usé de cette propagande pour montrer à quel point il était brimé par rapport au candidat du pouvoir.
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A contrario, Amadou Ba, le candidat de Bby, s’offre visites et inaugurations. Sa casquette de Premier ministre lui ouvre des portes fermées aux autres candidats. Il peut se permettre de se rendre à Tivaouane pour initier des travaux d’embellissement de la ville religieuse. Et par ricochet, de rencontrer des militants, le tout sous l’œil des caméras et les micros des différents médias. Il en ira de même pour toutes les localités où il passera. Il est accueilli avec toute la pompe réservée au plus haut dignitaire de l’Etat, après le président de la République. C’est le cas hier à Kaolack, où il s’est rendu, comme à Ndiassane et dans d’autres cités religieuses, dans le cadre des préparatifs des cérémonies du Gamou. Partout, les délégations officielles se mettent en rangs pour accueillir le Premier ministre, et des militants du pouvoir viennent acclamer leur candidat à la prochaine élection.
Un avantage que tous les autres candidats aimeraient avoir. Mais pour combien de temps ? En effet, après la désignation de Amadou Ba comme candidat de Bby, un remaniement gouvernemental est annoncé. Pour les besoins de la 78ème Assemblée générale des Nations unies, le Président Macky Sall s’est rendu à New York. Sauf changement de dernière minute, le remaniement devrait avoir lieu la semaine prochaine. Que va faire le Président ? Lui qui avait tenu à rappeler l’atout de Amadou Ba, va-t-il lui retirer l’avantage qu’il a sur les autres candidats en lui arrachant le poste de Premier ministre ? Ce faisant, il le ravalerait au rang de n’importe quel candidat. Il lui serait très difficile, sinon impossible, de tenir des rencontres politiques sous le couvert des déplacements administratives et économiques normales dévolues au chef du gouvernement. Quelle différence pourrait-il alors y avoir entre le candidat du pouvoir et par exemple, celui d’un parti ou mouvement non représenté à l’Assemblée nationale ?
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Par ailleurs, nommer un autre Premier ministre à moins de 6 mois de la Présidentielle, c’est le contraindre à faire une Déclaration de politique générale en pleine campagne électorale. Bien que les ministères des Sports, de l’Agriculture et de l’Artisanat doivent être pourvus, Macky Sall a le choix entre nommer 3 personnes à ces postes ou changer tout son gouvernement.
Au vu des enjeux et embûches qui se dressent de plus en plus face à sa candidature, il serait inconcevable que le chef de l’Etat en vienne à handicaper davantage le candidat qu’il a lui-même choisi pour son camp, en lui dressant d’autres difficultés, notamment en le privant de son poste de Premier ministre. D’ailleurs, lui-même, en 2019, quand il s’était représenté pour la Présidentielle, il avait gardé son gouvernement intact tout en battant campagne. Il ne semble y avoir aucune raison de croire que le chef de l’Etat dérogera à cette méthode pour en venir à changer de Premier ministre en ce moment.
mgaye@lequotidien.sn