Lequotidien 8 mars 2025 0

Plus de 20 jours après l’annonce d’une fuite de gaz au niveau du puits A02 de la plateforme de Gta, le gouvernement sénégalais a décidé de communiquer sur l’affaire. S’il met Bp devant ses responsabilités, il assure qu’il a déployé tous les moyens pour suivre les opérations de réparation en cours sur le site, situé à plus de 120 km des côtes sénégalaises, avec le déploiement de moyens technologiques et de la Marine nationale.

Mieux vaut tard que jamais ? Il a fallu une succession de révélations des médias et des réactions fermes de Nouakchott et de certaines Ong pour que l’Etat du Sénégal se résout à commenter l’affaire de la fuite de gaz constatée depuis la nuit du 19 au 20 février 2025 au niveau du champ gazier Grand Tortue Ahmeyim. Dès l’apparition des premières bulles, Bp a informé la République du Sénégal et la République islamique de Mauritanie, d’un incident sur le puits A02, «non encore opérationnel», situé à 120 km au large des côtes. Dans un communiqué conjoint, les ministères de l’Energie et du pétrole et de l’Environnement et de la transition écologique tentent de rassurer sur les mesures prises pour éviter une catastrophe écologique au niveau du site. «Les équipes techniques des administrations maintiennent les échanges avec l’opérateur, Bp, qui a la responsabilité de déployer les moyens techniques requis afin de limiter, voire éviter tout impact sur l’écosystème. L’Etat a exigé de l’opérateur qu’il prenne toutes les mesures nécessaires pour assurer la gestion rigoureuse de cette situation en veillant à ce que les opérations soient conduites dans le strict respect des meilleures pratiques de l’industrie pétrolière internationale telles que reprises par le cadre légal et contractuel applicable», notent les deux ministères.

L’Etat s’est montré intransigeant sur les mesures à prendre pour réparer la fuite. «Bp est ainsi tenu de déployer tous les moyens nécessaires afin de limiter les impacts potentiels et de mettre en place une solution rapide et pérenne pour résoudre l’incident.

A date, l’opérateur informe avoir identifié des solutions possibles pour réparer la fuite dans les plus brefs délais et qu’il travaille actuellement à leur mise en œuvre», note le gouvernement. Mais, il observe le déroulement des travaux. «Une surveillance multimodale de la zone est maintenue pour apprécier et suivre, autant que possible, l’impact de l’incident», note-t-il. Par conséquent, des mesures sont prises pour surveiller le déroulement des travaux en temps réel. Il y a «une surveillance régulière du plan d’eau autour du site par survols d’hélicoptères et de drones, le survol d’hélicoptère du 6 mars 2025, assuré conjointement par les deux administrations, n’a pas révélé d’anomalie visible ; une surveillance sous-marine permanente, par véhicule sous-marin téléguidé (Rov), est maintenue pour suivre l’évolution de la fuite, une surveillance satellitaire sur la zone est maintenue en temps réel ; les marines nationales assurent une présence permanente dans la zone pour sécurisation». D’après les deux ministères, la «situation est suivie de près par les administrations, en parfaite coordination, conformément à leurs prérogatives respectives. Dans ce cadre, des éléments précis sont collectés pour, notamment, alimenter une communication institutionnelle transparente et claire de la situation. Les administrations sénégalaises, en rapport avec celles mauritaniennes, poursuivent le suivi rapproché de l’évolution de l’incident et tiendront l’opinion publique informée», ajoutent le ministère de l’Energie, du pétrole et des mines et le ministère de l’Environne-ment et de la transition écologique.

Les craintes de la coalition Pcqvp
Par ailleurs, Publiez ce que vous payez (Pcqvp) Sénégal interpelle les autorités sénégalaises et British Petroleum sur la fuite de gaz au champ Gta. Elle appelle «à une clarification immédiate afin d’informer l’opinion publique sur les causes de cette fuite, son ampleur, ainsi que les mesures prises pour en limiter les conséquences environnementales et socio-économiques». La fuite de gaz au champ Gta pourrait entraîner des conséquences multiples comme la contamination des eaux marines, l’atteinte à la biodiversité, la contribution aux émissions de gaz à effet de serre, la menace sur les activités de pêche et de tourisme, avec un impact direct sur les moyens de subsistance des communautés locales et des risques pour la santé humaine en raison de la pollution de l’air et de l’eau. «Par conséquent, Pcqvp Sénégal appelle à une vigilance accrue et recommande de publier les résultats des enquêtes et inspections menées sur le champ Gta afin d’informer les citoyens sur la réalité des risques, de mettre en place un mécanisme de contrôle régulier des infrastructures gazières avec la participation de la Société civile, d’adopter des technologies avancées pour la détection et la prévention des fuites de gaz, ainsi que des plans d’urgence clairs et opérationnels.» Sans oublier d’assurer une gouvernance rigoureuse du secteur et de veiller à la responsabilité des entreprises exploitantes, et d’associer les populations concernées aux décisions et aux mécanismes de suivi des projets d’exploitation. «Pcqvp Sénégal réaffirme son engagement pour une gestion transparente et responsable des ressources naturelles. La coalition demande aux autorités sénégalaises et à Bp de faire toute la lumière sur cette fuite de gaz et de prendre des mesures concrètes pour éviter tout risque environnemental et socio-économique», insiste Dr Papa Fara Diallo, président de la coalition Publiez ce que vous payez.

Aujourd’hui, elle est préoccupée par les précédentes conséquences écologiques provoquées par des fuites constatées au Nigeria, au niveau de Delta du Niger, à Cap Lopez, à Port-Gentil.

Eventuelles conséquences écologiques L’inquiétude des populations de Ndiago

La Coordination économique et sociale du village de Ndiago, qui fait partie des communautés côtières exposées, parle d’une «situation de danger grave et imminent pour notre environnement et l’écosystème marin». «Nous sommes conscients que Bp parle souvent de la mise en place des mesures de sécurité pour la protection de l’environnement.
Cependant, nous avons constaté que ces mesures ne sont pas suffisantes pour répondre à nos préoccupations actuelles. Nous sommes déterminés à maintenir un écosystème marin sûr et sain pour le bien-être social des populations riveraines», note la structure, qui salue néanmoins «l’enquête ouverte par l’Etat». Elle demande aussi aux Ong agissant dans le «domaine de faire de même de manière approfondie et indépendante, pour faire toute la lumière sur cette affaire de fuite de gaz». «Nous suggérons que Bp et les membres du Consortium d’apporter des solutions rapides. Nous sommes convaincus que vous partagez notre préoccupation pour notre sécurité et que vous prendrez les mesures nécessaires pour garantir notre protection et celle de l’environnement», note-t-elle.

By Albert C. Diop

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