
Convoqué hier, Pape Malick Ndour a été placé en garde à vue à la Section de recherches de Colobane. Il était visé par l’article 80, avec des chefs d’accusation aussi lourds que divers : trouble à l’ordre public, appel à l’insurrection, atteinte au fonctionnement régulier de la République, atteinte au moral des Forces armées et des populations. Mais, la garde à vue a été levée au milieu de la nuit, sans qu’aucune charge ne soit finalement retenue contre lui.
Coup de théâtre au milieu de la nuit : la garde à vue de Pape Malick Ndour a été levée sur «instruction» de l’autorité judiciaire. Finalement, il est libre de tout mouvement, «et aucune charge n’a été retenue contre lui». Un véritable coup de théâtre judiciaire qui amène à se poser certaines questions : qu’est-ce qui s’est passé ? Pourquoi ? Le Quotidien sait qu’au plus haut sommet, la décision d’abandonner les poursuites a été prise, précipitant ainsi sa libération et plongeant tout le monde dans l’incrédulité.
Par contre, la notification de sa garde à vue, à la suite de sa convocation hier par la Section de recherches de Colobane, ne souffre d’aucun doute. C’est son avocat, Me Amadou Sall, qui l’avait annoncée à sa sortie de la Caserne Samba Diéry Diallo, où l’ex-ministre était auditionné. Pape Malick Ndour a été visé par le très controversé et liberticide article 80 du Code pénal. Bref, les chefs d’accusation retenus étaient lourds : trouble à l’ordre public, appel à l’insurrection, atteinte au fonctionnement régulier de la République, atteinte au moral des Forces armées et des populations. Cette convocation de l’ex-ministre de la Jeunesse fait suite à une auto-saisine du procureur de la République. Tout le monde pensait que ses déclarations controversées tenues lors de la marche pour la libération de Farba Ngom, samedi dernier, allaient connaître une suite judiciaire. Mais, la machine s’est emballée trop vite pour conduire l’ex-coordonnateur du Prodac dans les bras de Dame Justice.
Dès l’annonce de son arrestation, les cadres républicains se sont réunis en ligne, sur instruction du Président Macky Sall. Il a invité la Ccr «à prendre en main le combat et à se mettre en première ligne dans la riposte». Il s’agit de mener une bataille «médiatique» afin de défendre son coordonnateur et «ainsi rétablir la vérité», tout en restant «sur une ligne républicaine, dans le calme, la cohérence et la discipline, pour faire face, de manière ferme et résolument déterminée», à cette situation, considérée par les cadres de l’Apr «comme une épreuve collective». Et ils s’engageaient à défendre leur coordonnateur «avec responsabilité, intelligence et unité». «Le combat commence dès aujourd’hui, et se poursuivra aussi longtemps que nécessaire», note un cadre républicain. De manière plus officielle, il s’agit d’«une convocation précipitée et injustifiée», déclare la Convergence des cadres républicains (Ccr dont Pape Malcik Ndour est le Coordonnateur national). Dans le document, la Ccr dénonce, «avec la plus grande fermeté, la dérive autoritaire qui s’installe insidieusement dans notre pays où l’appareil judiciaire semble désormais instrumentalisé à des fins partisanes pour réduire au silence l’opposition et étouffer la liberté d’expression». Pour cette instance de l’Apr, «ce n’est pas seulement Pape Malick Ndour que l’on cherche à faire taire», mais «toute une génération consciente engagée et déterminée à défendre les valeurs républicaines et démocratiques qui ont toujours fait la fierté du Sénégal».
Déplorant cette situation, la «Ccr appelle tous les militants et sympathisants à rester mobilisés, solidaires et vigilants face à cette nouvelle provocation». Dans la même veine, elle exhorte «les forces vives et démocratiques du pays à se lever pour défendre l’Etat de Droit et refuser toute forme d’injustice politique». Il est également demandé à la communauté nationale et internationale de «constater et condamner ces pratiques d’un autre âge, indignes d’une République moderne». Dans son communiqué, la Ccr a tenu à souligner «qu’elle ne cédera à aucune intimidation». «Nous demeurons résolument engagés à défendre par tous les moyens légaux et légitimes la liberté, la justice et la dignité de nos membres, comme de tous les citoyens injustement ciblés. Trop, c’est trop ! Le Sénégal mérite mieux que la peur et le silence», a-t-elle déclaré.
L’Apr dénonce «vigoureusement» la prise d’otage de Pape Malick Ndour
A l’Alliance pour la République, on est stupéfait par cette arrestation. Dans un communiqué, le parti de Macky Sall dénonce «vigoureusement la prise d’otage de Pape Malick Ndour». Surtout que les conditions de sa convocation sont «ubuesques». «En effet, ce vendredi 24 octobre, à 14h 30, des gendarmes en civil l’ont interpellé en pleine prière du vendredi à la mosquée, afin de lui remettre une convocation pour le même jour à 16h, à la Section de recherches de Colobane», condamne l’Apr. Pour elle, «avec cette arrestation illégale et injuste, le procureur de la République exécute les ordres de ministres, directeurs généraux et députés de Pastef qui, depuis une semaine, ne cessent de lui intimer l’ordre d’arrêter Pape Malick Ndour». «Pape Malick Ndour est pris en otage conformément à la volonté du régime de poursuivre son acharnement sans précédent contre le parti.» L’Apr appelle ses responsables, militants et sympathisants à utiliser «toutes les voies de Droit pour faire face à cette entreprise de répression politique», ajoute l’ancien parti présidentiel.
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