Le Quotidien de Nouakchott – Mauritanie

Mohamed Ould Abdel Aziz, ancien président de la Mauritanie, s’est une nouvelle fois distingué par sa prestation devant la cour d’appel de Nouakchott. Là où on attendait une défense solide face aux accusations graves de corruption et d’enrichissement illicite, l’accusé s’est livré à un monologue fleuve, émaillé de proclamations narcissiques et de pseudo-réalisations. Un comportement qui a rapidement suscité l’indignation du procureur général, qui a qualifié son intervention de « meeting politique ».

Une défense à côté de la plaque

Au lieu de répondre aux charges qui pèsent contre lui, Aziz s’est lancé dans une longue tirade sur ses prétendus exploits à la tête du pays, se présentant comme le sauveur de la Mauritanie. Selon lui, son arrestation et son procès ne seraient qu’un complot politique, orchestré pour ternir son image.

Cependant, cette stratégie de victimisation s’est retournée contre lui. Aziz a multiplié les anecdotes sans pertinence juridique, notamment sur ses relations avec des figures religieuses et politiques, ainsi que sur ses soi-disant succès économiques. Ces digressions, loin de renforcer sa défense, ont exposé une profonde mauvaise foi et une incapacité à répondre directement aux faits reprochés.

Le procureur général intervient

Face à cette dérive, le procureur général Sidi Mohamed Ould Eddé n’a pas caché son exaspération. Il a rappelé que la cour était un lieu de justice et non une tribune politique. « L’accusé transforme cette audience en un meeting à des fins personnelles. Ce procès concerne des faits graves, et non ses réflexions sur la politique nationale », a-t-il déclaré.

Une attaque tous azimuts

Aziz n’a épargné personne dans ses diatribes. Il a accusé la police, la justice, les médecins, et même les parlementaires, qu’il a qualifiés de « corrompus ». Parmi ses cibles inattendues figurent des figures emblématiques comme le Cheikh Mohamed Hassan Ould Dedew, qu’il accuse d’avoir émis une fatwa pour l’incriminer, ou encore l’ancien président Mokhtar Ould Daddah, qu’il blâme pour des dettes contractées dans les années 1970. Une stratégie qui semble davantage relever de la diversion que d’une défense structurée.

Une fragilité manifeste

Pour beaucoup d’observateurs, cette posture agressive traduit une fragilité psychologique chez l’ancien président. Aziz, qui martèle qu’il n’est « pas faible », semble au contraire en pleine déroute morale. Sa stratégie consiste à attaquer tous azimuts pour éviter d’aborder le fond des accusations : des centaines de millions de dollars détournés au détriment du peuple mauritanien.

Une opération à étranger ?

Aziz a également évoqué son état de santé, affirmant qu’une opération à l’étranger était indispensable. Le procureur a cependant répondu que l’État était prêt à organiser l’intervention en Mauritanie, mais l’accusé a rejeté cette proposition, prétextant qu’il ne pouvait se faire soigner que dans un centre européen. Cette demande d’exceptionnel privilège illustre son refus de se soumettre aux règles du système judiciaire qu’il a pourtant contribué à façonner.

Une fin inéluctable

L’audience d’Aziz devant la cour d’appel constitue un nouvel épisode de son isolement croissant. Incapable de se concentrer sur sa défense, il s’enlise dans un discours déconnecté de la réalité. Si cette stratégie se poursuit, elle pourrait bien conduire à une condamnation plus sévère encore. Aziz devra répondre de ses actes, et non de ses « exploits passés », pour espérer convaincre la justice – et la Mauritanie – de sa bonne foi.

By Albert C. Diop

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